Rapport sur le sous-financement des organismes de Montréal : plusieurs groupes menacés de fermeture

Communiqué pour diffusion immédiate

Organismes menacés de fermeture à Montréal : le milieu communautaire victime à son tour des politiques d’austérité

MONTRÉAL, le 6 novembre 2014 –  Le Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM) et les 7 regroupements régionaux en santé et services sociaux sont extrêmement inquiets des menaces de fermetures d’organismes communautaires et de l’impact des mesures d’austérité sur les populations qu’ils desservent. Cette situation est dramatique puisqu’ils sont souvent le dernier filet de sécurité.

Un rapport publié aujourd’hui démontre les conséquences du sous-financement des organismes communautaires de Montréal. Une enquête réalisée auprès de 183 groupes montréalais révèle que 93 % d’entre eux ont subi les séquelles d’un financement à la mission insuffisant, et ce dans tous les secteurs : santé mentale, itinérance, femmes, déficience intellectuelle, VIH/sida, famille, personnes âgées, déficience physique et intellectuelle, aide aux personnes démunies, etc. L’annulation par les libéraux de l’engagement gouvernemental de rehausser leur financement de 162 millions a fait très mal.

Des organismes au bord de la fermeture

La Maison du Partage d’Youville, une banque alimentaire de Pointe St-Charles, est menacée de fermeture car son financement récurrent ne lui permet pas de répondre aux besoins grandissants de plus de 2000 personnes desservies. La fermeture du Centre A.S.P.A., un organisme unique de réhabilitation en dépendance, priverait 1100 personnes de services, ce qui les forcerait à se tourner vers le réseau public déjà saturé. Le Portail VIH-SIDA du Québec, un organisme qui informe l’ensemble de la population du Québec et aide des personnes atteintes, n’obtient toujours aucun financement du gouvernement. Women Aware, un organisme qui aide plus de 1300 femmes victimes de violence conjugale, n’arrive tout simplement plus à payer leur loyer avec un financement public dérisoire.

Des conséquences sur les populations et sur les employé-e-s

Le sous-financement a des conséquences tant sur les populations qui fréquentent les organismes que sur leurs employé-e-s. 38 % des groupes ont dû abandonner des services, 31 % ont des listes d’attente allant parfois jusqu’à plusieurs mois et 25 % ont dû instaurer une tarification malgré le fait qu’ils travaillent avec des populations démunies. « Il y a un service d’aide à l’allaitement pour lequel les mères doivent attendre en moyenne trois mois, alors que c’est tout de suite après la naissance q’elles ont le plus besoin de soutien » de confier Marie-Chantal Locas, agente d’analyse au RIOCM. La directrice de Women Aware se désespère elle-aussi des listes d’attente de son organisme mise en place en raison du manque de personnel et des difficultés financières : « Combien de femmes devront se faire battre, combien doivent trembler de peur sans savoir quel premier pas faire pour s’en sortir, avant que la situation ne devienne un cas valable d’être financé? »

La situation actuelle rend également les emplois précaires dans le milieu. 27 % des groupes disent faire face à un roulement élevé de personnel. Les mises à pied permanente (20 % des groupes) et saisonnière (16 %), les diminutions de salaire (16 %) et les fermetures temporaires (9 %) n’aident certainement pas à la rétention de l’expertise développée par une main-d’œuvre qualifiée. La plupart des salaires n’ont pas été indexés depuis plusieurs années alors que le coût de la vie augmente, ce qui fait en sorte que les travailleurs et travailleuses du milieu s’appauvrissent. Louise Bourbonnais, de l’Association québécoise des personnes aphasiques (AQPA), en témoigne : « La direction assume des tâches doubles de direction d’une fondation et d’un organisme avec un salaire comparable à celui d’une adjointe administrative expérimentée. » Alors que les cadres de la STM ont droit à une augmentation de salaire, les conditions de travail du milieu communautaire ne cessent de se détériorer malgré une augmentation des responsabilités qui lui incombent.

Le financement par projet et le désengagement de l’État empêchent la pérennité de projets novateurs en plus de faire augmenter le coût de leur implantation. C’est le cas à l’AQEPA : « Un nouveau programme d’aide aux proches a été instauré grâce à une subvention non récurrente. Une aide gouvernementale permettrait de maintenir ce programme qui disparaîtra autrement, et de répondre à la croissance de la demande de services dans un milieu non institutionnel qui occasionne des frais trois fois supérieurs à ce qu’ils étaient quand une institution gouvernementale offrait ses locaux pour le prix de l’entretien. » explique Louise Bourbonnais. C’est aussi le cas au portail VIH/sida, qui offre ses services d’éducation sur le VIH/sida et les ITSS à partir des nouvelles technologies et des médias sociaux. « Alors qu’un jeune sur quatre a été exposé à la chlamydia en 2013 et que nos demandes d’information ont doublé dans les derniers six mois grâce au succès de notre application mobile, nous sommes asphyxiés par le non-financement et n’arrivons pas à couvrir nos besoins de base (loyer, internet, téléphone, déplacement) que ne permettent pas de payer les fonds privés ou les projets éducatifs » de dire le directeur, Pierre-Henri Minot.

La ministre doit intervenir

Les regroupements de Montréal interpellent le gouvernement Couillard et particulièrement la ministre responsable du Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC), Lucie Charlebois, pour que soient injectés les 225 millions nécessaires à la réalisation adéquate de la mission des organismes en santé et services sociaux. Pour les organismes rattachés aux autres ministères (famille, immigration, éducation, environnement, défense des droits, etc.), plusieurs dizaines de millions sont nécessaires pour répondre aux besoins urgents.

Tandis que les services publics sont la cible de coupes budgétaires, la population se tourne de plus en plus vers les organismes communautaires pour répondre à leurs besoins. Sébastien Rivard, coordonnateur du RIOCM, désire rappeler à la ministre que c’est la population la moins nantie qui fait les frais des mesures d’austérité : « Madame Charlebois, il est temps de reconnaitre la place incontournable des organismes communautaires dans chacune des communautés. Nous avons les moyens de faire autrement au Québec. Le gouvernement doit reculer sur les mesures d’austérité! »

Une manifestation le 17 novembre

Pour rappeler que « le communautaire, on n’a pas les moyens de s’en passer », les organismes seront fermés le 17 novembre dans le cadre d’actions régionales à travers le Québec, initiées par la campagne Je tiens à ma communauté >Je soutiens le communautaire. À Montréal, une manifestation partira de la place Émilie-Gamelin à 13h et se dirigera en marche funèbre vers le quartier des spectacles.

logo_pdfPour télécharger le rapport :
https://riocm.org/wp-content/uploads/2014/11/rapport-riocm-sous-financement-nov2014.pdf

Pour plus de détails sur la situation des organismes qui ont témoigné :

logo_pdfLes témoignages :
https://riocm.org/wp-content/uploads/2014/11/temoignages2.pdf

logo_pdf

Communiqué du RACOR en santé mentale :
https://riocm.org/wp-content/uploads/2014/11/14-11-06-communique-racor-complet.pdf

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À propos du RIOCM : Le Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal réunit 300 organismes communautaires de la région métropolitaine, œuvrant en santé et services sociaux, famille, immigration et défense collective des droits.

Les regroupements régionaux en santé et services sociaux ayant également contribué au rapport :

  • Coalition pour le maintien dans la communauté (COMACO)
  • Comité régional des associations pour la déficience intellectuelle (CRADI)
  • Regroupement des organismes de promotion du Montréal métropolitain (ROPMM)
  • Réseau Alternatif et Communautaire des Organismes en santé mentale de l’Île de Montréal (RACOR en santé mentale)
  • Réseau d’action des femmes en santé et services sociaux (RAFSSS)
  • Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM)
  • Table des organismes communautaires montréalais de lutte contre le sida (TOMS)

 Pour information :

Bruno Laprade, agent de communication et de liaison 514 277-1118

Des représentants des groupes communautaires menacés de fermeture sont également disponibles pour des entrevues.